C’est la rentrée ! L’heure est au prix littéraire. Difficile d’y échapper.
Les prix se succèdent à un rythme soutenu. Les enjeux sont de taille, c’est qu’avec un prix, les ventes s’envolent. Ainsi, l’heureux lauréat d’un prix comme le Goncourt est quasi assuré de vendre plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires.
Alors, quand on sait que la production de romans n’a jamais été aussi importante qu’en cette rentrée 2022, où l’on en dénombre pas moins de 500 romans parus depuis le mois d’août, un prix, ça vaut forcément de l’or. Cependant pas sûr que, malgré cette profusion, les lecteurs y trouvent leur compte et notamment les lecteurs « senior ». Les lycéens ont leur prix, les habitués de la Fnac aussi, par exemple, mais les seniors ?
Rien. Nada. Nothing. Enfin, presque.
Aperçu en quelques titres
Quel est l’intérêt d’un prix spécial seniors ?
C’est évidemment la première question que l’on doit se poser. Les seniors sont-ils une espèce de lecteurs tellement à part que l’on doive leur réserver des titres en particulier ? En bref, y-a-t-il une lecture propres aux seniors ? On peut penser que oui, si on regarde ce que lisent les seniors. Mais, aussi, qu’après tout, senior ou pas, un lecteur est un lecteur.
Sauf que, si on en revient au réel, la littérature n’échappe pas davantage que les savonnettes aux diktats des lois du marché. De ce point de vue, ce n’est pas pour rien qu’il y a un prix pour les lycéens, et même, eh oui, pour certains seniors, ceux, notamment, des clubs de lecture des résidences seniors Domitys. Elément sûrement à prendre en compte quand on recherche une résidence seniors où investir pour ses vieux jours.
Le prix littéraire Domitys
Le prix Domitys mérite d’être mis en avant. Il est pour l’instant le seul de son genre. Et pour la petite histoire, c’est Gaëlle Nohant qui a remporté la 10ème édition ce prix en 2021 pour son roman « La femme révélée« . C’est d’ailleurs, elle, qui préside le jury 2022. Cinq finalistes sont en compétition pour l’attribution du prix 2022 :
- La nuit du premier jour, de Theresa Révay.
- 1991, de Franck Thilliez.
- Ce qu’il faut de nuit, de Laurent Petitmangin.
- Héritage, de Miguel Bonnefoy.
- Belle Greene, d’Alexandra Lapierre.
Pour participer au choix du lauréat, il faut être membre d’un club de lecture d’une résidence Domitys. Ce qui ne veut pas dire nécessairement y résider et participer aux échanges entre membres qui ont lieu à cette occasion.
Les principales sélections de la rentrée
Les principaux prix
Comme il n’y a pas de prix littéraire spécial séniors concernant tous les seniors, force est de se contenter de ce qui existe. A commencer par les « grands prix de formule 1 » de la littérature. On veut parler, bien sûr, des prix Médicis, Fémina, Renaudot, Interallié et star des stars, du prix Goncourt.

Leurs règles d’attribution
Difficile de s’y retrouver dans leurs sélections, à moins de tout lire, ce qui, il faut bien le dire, peut s’avérer un vrai pensum, s’agissant de certains opus pourtant présentés comme l’évènement littéraire de la rentrée, mais ayant surtout été touchés par l’onction de quelques revues influentes.
Ce qui, il faut bien le dire, rend la tâche, a priori, plus facile aux IA, les fameuses Intelligences Artificielles, soi-disant prédictives dans ce domaine ! Mais, quoi, ça permet quand même de faire le « buzz » autour des auteurs en compétition !
Une sélection pour un prix littéraire spécial seniors
Naturellement, cette sélection est complètement subjective, mais on s’en explique et c’est en attendant mieux.
Notre si chère vieille dame.
Anne Serre, éditions Mercure de France. Sélection Médicis.
Le dernier livre d’Anne Serre raconte l’histoire d’un manuscrit qu’une équipe de télévision s’efforce de reconstituer. Pourquoi ? Parce que son auteur, son autrice, plutôt, est mourante et ne peut pas l’aider. Bon, ça peut paraître bizarre comme entame, mais Anne Serre est une vraie écrivain pour laquelle le plaisir d’écrire passe avant tout, quitte à dérouter parfois ses lecteurs. Par ailleurs, c’est une écrivain confirmée. Outre le prix Goncourt de la nouvelle qu’elle a reçu en 2020, « Notre si chère vieille dame » est son 17ème roman.
Ce qu’on aime : l’indépendance d’esprit.
Un chien à ma table.
Claudie Hunzinger, éditions Grasset. Sélections Renaudot. Médicis
Toujours le plaisir d’écrire et celui de lire. Là, un jeune chien, en vérité, une jeune chienne, frappe, si l’on peut dire, à la porte d’un vieux couple, un peu coupé du monde et ne vivant que pour la littérature. Elle, est romancière et aime les marches en forêt; lui, est un lecteur addictif. Avec la jeune chienne, l’ordonnance de leur univers est soudain bouleversée. Il leur faut voir autre chose, d’autant que, visiblement, l’animal a vécu des évènements terribles.
Ce qu’on aime : le rappel de l’importance du rôle d’intercesseur que peut jouer un animal et son lien indissoluble avec le réel.

Tenir sa langue.
Polina Panassenko, éditions de l’Olivier. Sélections Fémina, Médicis
Voilà un livre bien de son temps. Quand on émigre faut-il accepter ou non de perdre son prénom d’origine ? C’est toute l’histoire, et bien au-delà, de Polina, née en Russie, et devenue Pauline, en arrivant en France, après la chute de l’URSS en 1989. On l’aura compris, il s’agit d’une autobiographie. Après tout, les temps et leurs mouvements migratoires constituent un environnement naturellement propice à l’écriture. Tout commence donc pour Pauline par une audience au Tribunal de Bobigny où elle a la ferme intention de récupérer son prénom d’origine.
Ce qu’on aime : le ton enjoué et la problématique identitaire débarrassée de son pathos.

Mes fantômes et moi.
Gabriel Byrne, Sabine Wiespieser Editeur. Sélection Femina étranger.
Voilà un livre étonnant. Ecrit par quelqu’un qui n’a rien d’un auteur professionnel, mais qui écrit comme un auteur professionnel et dont, en plus, c’est le premier livre. L’auteur, Gabriel Byrne, a commencé dans la vie de manière erratique, mais les expériences et le destin se montreront, somme toute, aimables avec lui. C’est donc le récit de sa vie qu’il nous offre dans ce livre à la prose très fluide, enchanteresse et pleine de flash-backs. Né en 1950, à Dublin, il « s’éclatera » en devenant, presque par hasard, une des vedettes d’une série télé à succès.
Ce qu’on aime : la philosophie de vie et le sens de la dérision à l’heure du bilan.

Les liens artificiels.
Nathan Devers, éditions Albin Michel. Sélections Goncourt, Renaudot, Interallié
Il n’a que 24 ans, mais déjà quel talent ! Agrégé de philosophie à 22, chroniqueur de télé, éditeur de la revue de Bernard Henry Lévy, la Règle du jeu, le jeune homme, de son vrai nom Nathan Naccache, fils de Lionel Naccache, membre éminent du Comité Consultatif national d’éthique, n’a pas attendu d’atteindre un âge canonique pour montrer de quoi il était capable. « Les liens artificiels » sont d’ailleurs son troisième roman. Il y parle de métavers et d’addiction aux jeux virtuels. Bon, ça peut lasser, mais c’est une réalité qu’on peut avoir envie de découvrir, d’autant que l’auteur n’embarrasse pas son lecteur de considérations excessivement techniques.
Ce qu’on aime : la précocité du jeune auteur et un bon moyen de briller devant ses petits enfants.

Le mage du Kremlin.
Giuliano da Empoli, NRF Gallimard. Sélections Goncourt, Interallié
On le sait, les seniors sont des accros aux chaînes d’info. Depuis quelques mois, il leur est donc impossible d’échapper au conflit entre l’Ukraine et la Russie. Et, il faut bien l’avouer, entre la propagande des uns et des autres, il n’est pas toujours facile de se faire une idée exacte de la situation. Indépendamment de la sympathie qu’on peut éprouver pour les ukrainiens injustement agressés et contraints de fuir leur pays. Alors, peut-être que le roman de Giulano da Empoli, par ailleurs président du think tank Volta, ex-conseiller politique de Matteo Renzi et professeur à Sciences po Paris est une bonne façon de mieux comprendre le fonctionnement de Vladimir Poutine. D’autant que ce n’est pas son premier livre. Son personnage principal, Vadim Baranov, à qui il fait jouer le rôle d’éminence grise du maître du Kremlin, apprendra bien des choses à ses lecteurs sur ce dernier.
Ce qu’on aime : le réalisme de l’auteur et la fiction à la John Le Carré.

Un prix littéraire spécial seniors, en résumé
Une sélection de six livres, tous retenus pour essayer de se faire attribuer un des grands prix de la rentrée littéraire 2022, pour constituer une super sélection pour un prix littéraire « spécial seniors », c’est assurément bien peu. Mais, c’est un début, et rien n’empêche de faire des propositions pour la compléter.
On peut se contenter d’autres ouvrages figurant dans les sélections des grands prix littéraires précités, on peut aussi ; ce qui est d’ailleurs plutôt recommandé ; s’intéresser aux autres prix du moment.
Citons notamment :
- Le Grand Prix du roman de l’Académie française.
- Le prix décembre.
- Le prix Wepler-Fondation laPoste.
- Le prix de Flore.
Sans oublier le prix Nobel de littérature, attribué cette année à Annie Ernaux. A noter que les trois précédents auteurs français récompensés par le prestigieux prix ont été Patrick Modiano, en 2014, Jean-Marie Le Clezio, en 2008 et Gao Xingjian, en 2000.