A tout moment la mort peut frapper un proche. Elle peut être soudaine, mais elle peut aussi faire suite à une longue maladie. Dans le premier cas, elle laisse les parents et les amis dans un état proche de la sidération. Dans le second cas, outre qu’elle est toujours difficile à accepter, elle implique aussi un ensemble d’attitudes vis à vis de la personne en train de mourir. Ces attitudes vont de l’incompréhension à l’impossible réconfort. Dans tous les cas, parler de la mort et parler à une personne mourante est un traumatisme. Or mourir, fait inévitablement partie de la vie. Alors pourquoi est-ce si difficile ?
Aperçu en quelques titres
Le rejet de la mort et de la maladie

Les effets du scientisme sur la perception de la mort
Avec l’essor des sciences et les innombrables améliorations techniques qu’elles ont permises, même si on peut toujours en discuter, la mort devient chaque jour qui passe de plus en plus incompréhensible.
On ne comprend pas qu’on puisse y succomber avant l’heure statistiquement convenue et qu’on ne puisse pas réparer efficacement les dommages subis avant cette heure. Les promesses du transhumanisme ne font qu’accentuer évidemment cette perception.
Les effets de l’imaginaire sur la perception de la mort
Le rejet de la mort est naturellement vrai pour les jeunes générations, mais il l’est aussi, de plus en plus, pour les personnes âgées, dénommées, pour l’occasion, seniors.
En effet, cette dernière dénomination est une manière de nier l’inéluctabilité de la fin de l’existence et une tentative d’atténuer le fossé qui ne cesse de s’agrandir entre « jeunes » et « vieux ».
Jeunisme et âgisme sont ainsi l’avers et le revers d’une même attitude. De sorte que lorsqu’il n’est plus possible de cacher les effets du vieillissement et, entre autres, les différentes pathologies qui l’accompagnent, la tentation est grande d’en faciliter l’escamotage par ce qu’on appelle pudiquement « la fin choisie« .
Les attentes de la personne mourante

Un constat : la personne mourante se sait en train de mourir.
La relation entre une personne mourante et ses proches commence, souvent, par un mensonge. L’usage exagéré de l’expression « fin de vie » de préférence à celui de mort prochaine y contribue d’une certaine façon.
Dans ce cas, la personne mourante ne veut pas effrayer ses proches et cherche à minimiser le mal qui peu à peu la ronge.
Quant aux proches, ils ont beaucoup de mal à concevoir que la personne mourante l’est vraiment. Jusqu’à la dernière seconde, ils espèrent qu’une improbable rémission va quand même avoir lieu.
Pour autant, ce n’est plus qu’une question de temps pour que la personne décède. Alors, quelle attitude adopter dans ces circonstances ?
Comment accompagner une personne qui se sait en train de mourir ?
Ce n’est évidemment pas simple. Souvent on préfère laisser ce soin à du personnel qualifié, notamment, celui qui s’y dévoue courageusement, par exemple, dans les services de soins palliatifs.
On peut aussi faire appel à des accompagnants d’associations tels que ceux des petits frères des pauvres.
Mais, si cela permet d’assurer un accompagnement permanent, ou quasi permanent, cela ne peut pas remplacer la présence régulière, à un moment où à un autre, des proches.
Rien n’est pire pour la personne mourante que d’avoir le sentiment de mourir seule et d’être abandonnée de tous.
Les paroles des accompagnants
Une chose est certaine, ce n’est plus l’heure des règlements de compte, c’est plutôt celle, quoi qu’il en soit, du pardon et des protestations d‘amour ou d’amitié.
Inutile de même de se lancer dans de grandes considérations sur la vie et la mort. Ou de décrire des projets auxquels la personne mourante ne pourra pas, de toute façon, participer.
Et encore moins, de donner l’impression d’être venu simplement pour remplir une obligation et se donner ainsi l’occasion de se rassurer sur le fait d’être soi-même encore bien en vie.
Si on est dans cette disposition d’esprit, mieux vaut rester chez soi. De toute façon, la personne mourante n’est pas dupe.
Le ton se doit, enfin, d’être paisible et sans nier la réalité de ce qui est entrain de se dérouler, on peut évoquer des évènements passés qui ont été heureux et dont on veut qu’ils restent gravés dans la mémoire de ceux qui restent et dont ce n’est pas encore l’heure.
Les gestes des accompagnants
Ton paisible, mais aussi gestes et attitudes paisibles. Glisser peu à peu vers la mort s’accompagne toujours d’une grande fatigue. Est-il besoin de le rappeler ? On comprend, néanmoins, qu’on veuille se rendre à plusieurs dans la chambre d’une personne en train de mourir et qu’on ait du mal à la laisser seule.
Qu’on veuille même y entrainer de jeunes enfants pour un dernier adieu. Mais, dans ce dernier cas, il faut tenir compte de ce qu’ils sont et ne pas leur imposer une présence qui dépasse leur entendement. Et encore moins, abuser de leur patience. C’est ainsi.
Il convient donc d’éviter toute agitation inutile autour de la personne mourante et de veiller à ne pas l’embarrasser en croyant bien agir.
Se préparer à la mort d’un proche
Cette préparation concerne bien évidemment les proches de personnes dont on appréhende la mort à une plus ou moins brève échéance. Soit du fait de leur vieillissement, soit du fait de leurs pathologies. A plus forte raison quand les deux sont combinés.
Ne pas nier l’évidence
Il faut sans aucun doute commencer par se dire que cette mort que l’on croyait très éloignée dans le temps est désormais quelque chose qui peut arriver du jour au lendemain.
Pour cela, les signes ne manquent pas. La personne elle-même qui se plaint, à juste titre, en permanence. Et, à plus forte raison, quand elle est âgée. Son entourage immédiat qui ne se montre guère optimiste. Entre autres.
En parler avec des personnes de confiance
Il est bon de partager les doutes qu’on peut avoir sur l’état de santé réel d’une personne avec des personnes de confiance. A commencer par son médecin habituel. Déontologiquement, il ne peut rien dire de précis sur une échéance quelconque, mais il peut quand même éviter qu’on ne se fasse trop d’illusions.
Être prêt à se confronter à d’éventuelles dissensions familiales
Pour en prendre toute la mesure, il peut être utile de lire un certain nombre d’ouvrages tels que, par exemple, celui d‘Olivier Adam, intitulé « Dessous les roses« . L’auteur y montre tous les remous qui peuvent agiter une fratrie désunie après la mort d’un père.
Autant dire qu’il vaut mieux y réfléchir avant pour éviter de se laisser emporter par des émotions et des ressentiments qui peuvent être malsains. Autrement dit, il est peut-être temps de reprendre contact avec les membres de la famille qu’on n’a plus vu depuis longtemps.
Prendre des dispositions
Ces dispositions, ce sont principalement celles qui concernent les obsèques et le logement de la personne mourante. On ne le dira jamais assez, les obsèques coûtent cher et si la personne décédée n’a rien prévu, c’est aux ayants-droits d’en fixer les modalités et d’en avancer les frais.
Certes, ils peuvent se les faire rembourser, si la succession le permet, ou s’ils peuvent bénéficier d’aides. Mais, en attendant, il leur revient de faire le nécessaire pour que les obsèques puissent se dérouler dans les six jours suivant le décès de leur parent. Les conditions de ce déroulement sont, naturellement, fonction du rite funéraire retenu et de l’endroit où le décès a lieu.
Par suite, dès que le décès du proche commence à se profiler, et même sans ça d’ailleurs, il est bon de s’assurer qu’une provision pour ces frais a pu être constituée ou, à défaut, qu’il existe une convention ou une assurance décès. Sachant que dans ce dernier cas, l’une ou l’autre sont assortie d’un délai de carence, en général, d’un à deux ans.
De plus, le montant de cette provision est fonction de l’existence ou non d’un caveau familial.
A noter enfin, que le décès d’un proche, locataire, par exemple, dans une résidence seniors, signifie que ses ayant-droits vont avoir à assurer le déménagement de ses meubles dans un délai très bref. Opération qui doit quasiment être menée de front avec les obsèques.
A noter que si le bail de la personne décédée est résilié d’office si elle vivait seule, il n’en reste pas moins qu’une indemnité d’occupation est à la charge des ayants droits-tant que le logement de la personne décédée n’est pas libéré. Sauf indication contraire, cette indemnité est égale au montant du loyer.
Être digne et faire son deuil
Le décès d’un proche est malheureusement impossible à éviter. Faire comme s’il ne pouvait jamais avoir lieu est la pire des choses. Et surtout, ce décès renvoie nécessairement à sa propre mort, à laquelle la société moderne prépare moins que jamais.
Or, il est certain que de la façon dont la personne mourante est accompagnée et son décès entouré dépend le deuil qui le suit. Si on ne doit retenir qu’un principe, c’est celui d’agir dignement, c’est-à-dire en respectant la personne qui part. En toutes circonstances.
Cette dignité et ce respect se marquent, notamment, par le choix d’une tenue appropriée et d’attitudes, comme on dit, « de circonstance ». Entre autres, pour ce qui est de ces dernières, par des propos, des sons, une gestuelle qui soient à la hauteur de l’évènement, Quand bien même, le défunt n’est ni prince, ni roi.
Un proverbe chinois qui illustre bien ce que la mort apporte à la vie et le sens qu’elle peut lui donner dit ainsi :
La vie est la voie de la mort, la mort est la voie de la vie.
De ce point de vue, la façon dont on meurt et dont on traite un corps, une fois mort, ne peut pas l’être sous un angle comptable ou écologique. Le faire, malgré tout, c’est s’engager sur le terrain dangereux de la décivilisation. Bref, la mort, ça se respecte.
